samedi 3 octobre 2009

Concours de nouvelles 2009: les lauréats (3/3)

Et voilà, notre concours annuel de nouvelles s'est achevé. Encore une fois, le succès a été au rendez-vous puisque nous avons battu un nouveau record de candidats. Faut dire que la dotation en lots était particulièrement exceptionnelle cette année.
Profitons donc des trois nouvelles qui ont été primées par les très nombreux votants... tout en relisant les autres directement sur le forum: http://communist.forumpro.fr/forum.htm Pourquoi bouder notre plaisir, hein, pourquoi?

Le grand vainqueur de cette édition 2009 est Bombi. Félicitations à lui! Bonne lecture!



Je suis un branleur. Et fier en plus. Fainéant, paresseux, oisif, bon à rien, nonchalant, tout ce que vous voulez. Je fous rien et j’assume. De l’espèce homo-ça-pionce. Je me laisse aller à rien faire. Je bulle, je flemmarde, je glande. Et pire, ça me plait. J’ai jamais rien foutu. Une sorte de plan de carrière que, jusqu’à présent, je n’ai jamais dérogé. Et comptant bien le suivre jusqu’au bout. Représentant officiel des procrastinateurs, je rêve que d’une chose. Etre un assisté.

Donc, je comptais sur vous. Bande de connards de travailleurs. Et me filer du fric grâce aux assedic. Pour sur. Je déteste par-dessus tout les hyperactifs, les nerveux, les excités du boulot, les activistes du travail, les terroristes du labeur. Des drogués. Sauf que. Saleté d’anpe, ils m’ont forcé à travailler quelques jours. Pour garantir mes allocs. Histoire.

Adieu bouquins, hamacs, cinoche et heures de sommeil. Troqué charentaises, contre un vieux costard. 35 heures de bonheur et journée type.

9h45 bien tassé. Pour un départ fixé 45 minutes plus tôt, la course commence mal. Arrivé d’un pas tranquille, voir trainant des pieds. On pose tranquillement ses affaires, passe dire un grognement en guise de bonjour aux collègues et allume l’ordinateur. Le temps que le pc capricieux se lance, je décide d’aller prendre un café. Productivité, productivité.

10h15, retour au bureau. Sur le chemin de la machine à café, croisé d’autres cadres sup’ dont leurs ordis vont à la vitesse du mien. Entre retours sur les matchs du week end, histoires de cul, les confidences sur le boulot tombent déjà.
- En ce moment, je suis débordé moi.
- Ben tiens, pareil. Je vois pas le jour.
La messe est dite.

10h25, Clic simple sur l’icône messagerie. Aucune réaction. Second clic. Toujours rien.

10h29, Se souvient qu’il faut double-cliquer. Plus vite. La journée va être longue.

10h31, le chef déboule dans le bureau. Le teigneux se fait pressant. Il a pas de vie le week end lui ?
- Concrètement, t’en es ou de ce que j’ai donné il y a 15 jours ? T’as avancé ?
- Non mais attends, bien sur. Je suis dessus depuis trois jours.
- Tu patines ?
- Au contraire, je suis même complètement en avance.
- Bon, ok, on en reparle demain matin. Tout doit être au point pour le codir du mercredi.

10h32, entrée intempestive dans le bureau du voisin. J’engueule le stagiaire. Non mais c’est vrai, il ne m’a toujours pas rendu ce que je dois présenter au boss le lendemain. Remontrances et menaces, on est encore dans les temps.

10h43, consultation de la montre. Parfait, direction le bureau de l’assistante fraichement recrutée. La petite a l’air ravi de mon passage. Suis tellement gentil qu’elle dit. Suis sur que je vais me la faire, ouais.

11h15, largement le temps de prendre une première pause. Direction l’espace détente. Entre les pouffiasses et les fils à papa flambeurs. Pendant que certains comparent leurs tickets restos comme leurs bites, d’autres parlent météo, de leurs chiards ou chômage. Heureusement, on retrouve les mêmes, qui te proposent un coup de whisky dans le café, planqué derrière la photocopieuse. Productivité, productivité.

11h52, retour au bureau, pour s’assoir en face de la collègue, mi-vache mi-cheval, qui tire la tronche et continue de s’enfiler des gateaux toute la journée. Décroche le téléphone pour prendre des nouvelles de pote d’une filiale du Nord. Histoire de savoir quelle pute il s’est tapé la veille.

12h10, deuxième entrée intempestive du chef. C’est qu’il prendrait ses habitudes ce con.
- Dis donc, je ne te vois pas beaucoup travaillé !
- Non mais attends ! le téléphone n’arrête pas de sonner ! les filiales sont beaucoup trop dépendantes du siège et…
Trop tard. Il est parti.

12h25, départ plus tôt. Pause midi.

14h22, le repas avec mon poto à durée plus longtemps. Faut dire que le vin rouge ça tache. Se prépare pour une petite sièste, la main dans le calbute.

15h00, se décide à s’intéresser à mon téléphone, dont c’est la sixième salve de sonneries depuis un bon quart d’heure.

15h01, merde, c’est professionnel. Et c’est un homme.

15h54.
- Tu réfléchis ?
La voix grave de l’autre moche d’en face me fait sursauter. Du coup, je m’aperçois que je contemple mon écran depuis au moins vingt-cinq minutes. L’esprit vide. Les yeux dans le vague.
- Evidemment, je réfléchis. Je fais pas un bowling.
- Alors si ça t’ennuie pas, tu peux me donner ta réponse sur la dossier Machin ?
-...Eh eh, tu vas rire. J’ai pas eu le temps de jeter un œil.
- Et tu penses le faire quand ?
Oh ça y est, elle recommence à me gonfler, cette conne.
- Non mais attends, je suis débordé moi. J’ai un comité à préparer pour mercredi. Tu n’as aucune idée du travail que ça représente. T’avais qu’à prendre des initiatives et répondre toi-même, merde.

15h57, le temps pour une seconde pause café. Sur le chemin, croise une nouvelle assistante et l’invite prendre un café. Elle aussi, je vais me la faire. Pas perdue cette journée.

16h01, d’autres collègues arrivent. Me plante mon coup ces cons. Et en plus, ils enclenchent la situation.
- Pff, je suis débordé moi.
- Bah eh, on est pas la que pour se tourner les pouces hein.

16h22, en quête d’un responsable pour une info. Je rentre dans le bureau du sus-nommé. Il est au téléphone. Parfait, je m’assois en face de lui et le fixe des yeux.

16h34, il raccroche. Merde, il a été plus rapide que prévu. Je bredouille une question et repart avec de la doc sous le bras. Content de ma stratégie.

16h52, entrée intempestive de la pétasse de secrétaire du boss, un comptable, deux informaticiens. C’est dégueulasse, ces genres de réunions surprises. Comment je peux planifier de manière efficace mon boulot dans ces conditions ?

16h53, visiblement cette réunion était prévue depuis longtemps.

16h57, bla bla bla, je pane rien. Suis complètement largué, à la masse. Hoche la tête de temps en temps. Histoire de.

17h13,tous ces cons se retournent vers moi.
- Et qu’en pense le chef de projet ?
Bordel de merde, ils me fixent. Merde, qu’est-ce que c’est ce projet dont je serais responsable ?
DRIIIIIIING ! Ouf, sauvé. Le téléphone est mon meilleur ami.

17h14, c’est professionnel. L’occasion de briller. C’est le moment de gueuler fort et déballer tout le vocabulaire technique dans le vide. J’excelle. Et fais durer le coup de fil. De quoi faire perdre patience aux perturbateurs de tout à l’heure. Ils quittent le bureau, un par un.

17h23, enfin seul. Le moment semble bien choisi pour aller lire mes mails et guetter les vidéos de youtube. Sans le son, je suis pas un bleu.

17h42, troisième entrée en force du peigne cul qui me sert de chef. Note pour plus tard : mettre une pancarte interdit aux cons. Ca le fera peut être tourner les talons. Et de ma collègue d’en face, par la même occasion.
- La réunion de tout à l’heure s’est bien passée ?
- Super. Je maitrise la situation. J’ai réussi à les convaincre de…
Trop tard. Il est parti.

17h57, déjà ? Rangement des affaires et éteinte de l’ordinateur. Evite de prendre l’ascenseur, obligeant de passer devant le bureau du boss. Quatre étages à pied, ça me fera du sport tiens. De quoi, me mettre d’appétit pour prendre ma pinte dans le troquet d’en face.


Bombi

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