vendredi 2 octobre 2009

Le tour du monde du foot roumain en 3967 jours (Etape 4/3967)

Puisque le foot roumain fait bander la planète, pourquoi ne pas en faire le tour du monde? Clubs, joueurs, légendes, petit tour d'horizon de tout ce qu'il faut savoir en 3967 étapes.


Etape #4

Venus Bucuresti


Club totalement méconnu de nos jours, le Venus Bucuresti a pourtant été le plus grand club roumain entre deux guerres.

Aujourd'hui disparu, il figure au panthéon du football roumain, étant toujours le 3ème club le plus titré de Roumanie derrière le Steaua et le Dinamo, avec 8 titres de champion de 1915 à 1949.


Negrii (les noirs), surnommés ainsi du fait de leur tenue « all-black » a été un des clubs les plus populaires de son époque.

Principallement grâce à l'atmosphère amicale qui y régnait. L'équipe était composée d'une bande de potes, dont le bien-être de tout le monde et le fair-play importaient plus que les victoires sur le terrain.

Une bande de potes, qui se voyait en dehors du terrain, un peu comme une famille pour faire une image daubée.

On trouve assez peu de documents sur cette période. Il existe un livre, (Il dio si diavolii din fata portii de George Mihalache), sorti en 1979 qui retrace les souvenirs de Mircea David (bientôt un article sur ce joueur), ancien gardien de l'équipe nationale et du Venus, dont j'ai pu trouver quelques extraits. Mircea David fut surnommé Il Dio par les italiens lors d'un match d'anthologie entre Italie et Roumanie en 1940 (miam, il me tarde de le raconter)


Si vous ne mémorisez pas bien le visage de Mircea David, c'est pas grave, vous reverrez la même photo lors de l'article qui lui sera consacré...


Comme témoignage de cette mentalité propre au Venus, il y a ces anecdotes véridiques que je vais vous conter.


Les anecdotes qui tuent...


Lors d'un match contre Gloria Arad, les noirs sont largement favoris. Ils jouent les premiers roles en championnat, alors que leurs adversaires d'un soir sont en grande difficulté. L'entraineur du Venus aligne son équipe-type, tout semble réuni pour que l'on assiste à la branlée du siècle.

Le match se déroule tranquille pour Venus mais ses attaquants ne marquent pas, croquant un nombre incroyable d'occazes ou butant sur le gardien du Gloria, Francisc Theimler.

Le score est de 0-0 et le match arrive bientôt à son terme. Le gardien du Venus, Mircea David en personne, ne comprend pas comment ses partenaires n'arrivent pas à forcer la décision. Ca semble tellement improbable.

Lors d'un arret de jeu, il va voir un de ses attaquants, Silviu Ploestanu, pour lui demander ce qu'il se passe.

Et Ploestanu de lui répondre: "Laisse courir, Mircea, le gardien est assez déjà assez malheureux comme ca. Il a perdu son gosse ce matin. Qu'est-ce qu'on peut rajouter, hein? Il faudrait qu'en plus, on lui marque des buts?"

Le Venus fera 0-0, alors que tous ces rivaux pour le titre l'avaient emporter facilement contre le Gloria Arad.

Les joueurs ont pris une amende de la part du club pour ce résultat. Mais ils s'en foutaient. L'argent avait moins d'importance que le fait d'aider à leur manière un homme en détresse. Il leur semblait beaucoup plus essentiel de ne pas rajouter à la peine d'un homme, fut-il uyn adversaire, que de remporter un match.

Comme c'est émouvant, j'en suis tout bouleversé d'écrire ses lignes.


Y'a aussi l'histoire de ce type, une des stars de l'équipe, Gheorghe Albu, qui un jour, alors qu'il a 30 piges environ, va voir ses potes et leur dit: « Les gars, j'ai bien réfléchi. Depuis quelques temps, j'en chie sur le terrain. Je sens que vous êtes gênés pour me le dire. Mais sur le coté gauche, il faut un espoir, pas seulement un nom. Pour le Venus, je sens que je serais plus jamais ce que j'ai été. Sandu, je te laisse la place coté gauche ».

Le type a fait passer les interets du club avant les siens. Il se barrera en division inférieure à Craiova. Un peu comme si Cris à Lyon était allé voir ses coéquipiers y'a 2 ans pour leur dire qu'il était cramé et qu'il se barrait à Cassis-Carnoux. Impensable.


Le geste symbolique de Gheorghe Albu a fait réfléchir Bernard Mendy.


Un palmarès sympatoche...


Niveau palmarès, le Venus compte 8 titres de champion (1920, 1921, 1929, 1932, 1934, 1937, 1939, 1940)

Il n'a jamais remporté la Coupe de Roumanie, en butant 5 saisons consécutives (de 1935 à 1939) en demi-finale contre le grand rival de l'époque, le Rapid Bucuresti.

Ils perdirent également la finale de 1940 contre ce même Rapid, le match ayant été joué 4 fois, les 3 premiers se terminant par un nul (la séance de penaltys n'existait pas à l'époque). Pour le 4ème match, les joueurs avaient comme promesse de prime, une mobylette par tête. Classe mais ca n'a pas suffit.

Le Venus a également participer trois fois à la Mitropa Cup, la Coupe d'Europe centrale qui réunissait 7 pays (Autriche, Hongrie, Italie, Roumanie, Suisse, Tchécoslovaquie et Yougoslavie)

En 1937, il perdirent en 1/8ème de finale perdu contre Ujpest puis en 1939, ce fut en quart de finale contre Bologne et enfin en 1940 en quarts également contre le Belgrade SK.


La disparition du Venus...


En 1948, la loi obligea les clubs à être affilié à un syndicat ou à un organisme d'état. Le Venus fusionna donc avec les Uzine Comunale Bucuresti (usines communales de Bucarest) pour devenir Venus UCB. Fin 1948, alors que le « nouveau » club évolue en D3, il est dissout de manière totalement arbitraire pour des raisons plus que floues puisque je ne les connais pas vraiment. Mais merci aux bolchéviques qui, en moins de 4 ans, ont fait disparaître le club le plus gallonné du pays.

En 1953, le quartier et le stade du Venus ont été démolis, laaissant place à une zone militaire puis aujourd'hui à un parc.

De temps à autre, une équipe renait sous le nom de Venus Bucuresti, mais y'a aucun rapport avec cette fameuse équipe de l'entre deux guerres.


Jean-Eudes Filipescu

5 commentaires:

  1. Oh c'est beau comme une vénus de Milo à qui on aurait greffé un bras pour qu'elle puisse manger du chocolat.

    sinon sur http://www.romaniansoccer.ro , ils disent ça à propos de la disparition du Venus:
    "In 1948-1949 Venus plays in Divizia C, but in February 1949 this division is closed, one of the official reasons being useless absence of players from work before weekends. The teams returned in county championships, some of them promoted in Divizia B, but Venus dissapeared."

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  2. Yep exact, je l'avais vu au tout début de mes recherches mais finalement j'ai complètement zappé.

    Ca reste assez obscur quand même, y'a du politique là-dessous. La mentalité du Venus était pas très communisto-soviétique.

    Merci pour ces précisions.

    Romaniansoccer, on y trouve des stats interessantes (même si incomplètes et parfois pas trop à jour)

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  3. Oui c'est assez bizarre le prétexte invoqué. Même au cas où la D3 avait vraiment créé de l'absentéisme, ça devait pas concerner bcp plus de 4-500 joueurs, sur un pays de 16M d'hab. à l'époque...

    Sinon je salue ta révélation à propos de la décision de B. Mendy de quitter Caen qui s'inspire du départ de G. Albu du Vénus. Quelle classe ce B. Mendy, préserver Caen de cette façon, en dépit de sa carrière sportive!

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  4. Tu sais, les fins de saisons en roumanie sont toujours rocambolesques.

    Ca va jusqu'à dissoudre des clubs pour permettre à d'autres de monter.

    Cette saison, la L3 a attaqué avec du retard parce que une semaine avant la reprise du championnat, on ne savait pas encore la composition des groupes (qui ont été encore modifiés la veille du premier match!!!)

    Pour Mendy, fais gaffe à ce qu'il signe pas chez les verts un jour pour confirmer la référence à Albu! :-)

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  5. Aucune chance, ya déjà Varrault(dilnho)

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